Parabole du Jugement Dernier
Parabole du Jugement Dernier, dernière semaine préparative avant le Grand Carême.
Pour la dernière fois avant le Grand Carême, le Christ nous rappelle que sans l’amour les uns pour les autres, l’amour pour Dieu est impossible. Avec le récit du Jugement Dernier, l’Évangile résume l’épître de st. Jean selon lequel « si quelqu’un dit : ˮJ’aime Dieuˮ et qu’il haïsse son frère, il est un menteur. Car celui qui n’aime pas son frère qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu qu’il ne voit pas » (1 Jn. 4 : 20).
Le Seigneur place l’amour de Dieu et du prochain au-dessus de tous les autres commandements et vertus[1], nous appelant, à l’exemple du Bon Samaritain, à voir un prochain en chaque personne, quelle que soit sa couleur de peau, sa religion, sa nationalité, ses convictions politiques, etc. (Lc. 10 : 25-37).
L’histoire du Jugement Dernier n’est même pas une parabole, car une « parabole » – est une histoire allégorique. Ici, tout est dit de manière directe. Dans ce texte, il n’y a pas de comparaisons (sauf pour comparer les justes avec des brebis, et les pécheurs avec des boucs), ni de paraphrases.
« Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger, et vous m’avez accueilli ; nu, et vous m’avez vêtu ; malade ; et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus à moi » (Mt. 25 : 35-36).
Parlant du Jugement Dernier, le Seigneur entre en polémique directe avec les pharisiens, citant presque mot à mot le prophète Isaïe[2]. C’est aussi pourquoi l’Église nous propose cette lecture évangélique avant le Grand Carême, puisque le prophète Isaïe relie le jeûne (dont les pharisiens étaient si fiers !) au souci du prochain.
A partir d’autres passages des Saintes Écritures, nous pouvons conclure que le sens du Grand Carême ne concerne pas du tout ce que nous mangeons ou ne mangeons pas[3], mais à quel point nous nous aimons les uns les autres. C’est dans ce contexte (même s’il parle des offrandes aux idoles) que l’apôtre Paul dit : « Ce n’est pourtant pas un aliment qui peut nous rendre agréable à Dieu : si nous en mangeons, nous n’y gagnons rien ; si nous n’en mangeons pas, nous n’y perdons rien non plus. Mais prenez garde que la liberté que vous prenez ne devienne pour les faibles une occasion de chute. Lorsque vous péchez de la sorte contre les frères en blessant leur conscience faible, vous péchez contre le Christ. Ainsi donc, si un aliment est pour mon frère une occasion de chute, j’abstiendrai pour jamais de viande, afin de ne pas être pour mon frère une occasion de chute » (1 Cor. 8 : 8-9, 12-13).
Le Seigneur nous affirme que déjà ici sur Terre, nous déterminons nous-mêmes notre place dans l’au-delà, et que Jugement Dernier n’est qu’un constat du choix que nous avons fait. Lors du Second Avènement, le Christ apparaîtra dans Sa gloire pour juger toute l’humanité. Ce jugement est aussi appelé « terrible » parce qu’il est le tout dernier : après lui il n’y a que le bonheur éternel ou la souffrance éternelle. Cependant, il ne faut pas imaginer – par le mot « jugement » – que Dieu se réjouisse du châtiment des pécheurs. A propos de leur sort, le Seigneur dit avec regret : « Retirez-vous de Moi, maudits. Allez au feu éternel déstiné au diable et à ses anges » (Mt. 25 : 41). Pourquoi avec « regret » ? Parce que, comme nous le voyons dans Ses paroles, ce feu n’a pas du tout été préparé pour les gens.
De nombreux passages parallèles évoquent le même sort pour les justes et les pécheurs. Dans la parabole de l’homme riche et de Lazare, Abraham répond à l’homme riche, qui de son vivant n’a même pas remarqué le mendiant Lazare : « Souviens-toi que tu as eu tes biens durant ta vie, et Lazare, ses maux ; maintenant il est ici consolé, et toi, tu souffres ». Abraham dit aussi à propos des frères du riche qui sont restés sur terre et ont vécu dans l’injustice : « Ils ont Moïse et les prophètes : qu’ils les écoutent ! » (Lc. 16 : 25, 29).
« L’oppresseur du pauvre outrage son Créateur, mais c’est L’honorer que d’avoir pitié de l’indigeant » (Prov. 14 : 31).
« Celui qui vous reçoit, Me reçoit. Celui qui Me reçoit, reçoit Celui qui m’a envoyé. … quiconque aura seulement donné un verre d’eau fraîche à l’un de ces petits, parce qu’il est Mon disciple, en vérité, Je vous le dis, il ne perdra point sa récompense » (Mt. 10 : 40, 42).
Nous pouvons commencer à réfléchir ainsi : « Je n’aiderai pas mon voisin parce qu’il n’y en aura pas assez pour moi ou ma famille ». Le Seigneur répond à de telles réflexions : « Celui qui tentera de sauver sa vie, la perdra : celui qui l’aura perdue à cause de Moi, la retrouvera » (Mt. 10 : 39).
De plus, l’histoire du Jugement Dernier parle de notre compréhension imaginaire du service de Dieu. Il nous semble que nous plaisons à Dieu en lisant chaque jour un nombre d’akathistes sans compte, mais en même temps nous ne remarquons pas les personnes ayant besoin de nous.
Saint Philaret (Drozdov) commente ainsi le sort des justes et des pécheurs : « Alors le sauvage, récemment converti au Christ, prendra sa place parmi les élus, et celui qui est né dans le christianisme restera parmi les exclus ; un homme simple s’envolera jusqu’au Ciel, et le serviteur d’autel indigne sera couvert de honte et de disgrâce ».
Dieu est impartial, il ne regarde pas le sacerdoce, le fait qu’une personne fréquentait l’église toute sa vie. Pareillement, Dieu ne regarde pas les péchés commis par l’homme – le récit du Jugement Dernier ne parle pas du tout des péchés de l’homme comme d’un obstacle à son entrée dans le Royaume des Cieux. Le Seigneur regarde notre le cœur humilié et le degré de son repentir :
« Lavez-vous, purifiez-vous, cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien, respectez le droit, protégez l’opprimé, rendez justice à l’orphelin, défendez la veuve. Ayant fait cela, venez, expliquons-nous, dit le Seigneur. Vos péchés seraient-ils écarlates, ils seront blanchis comme la neige » (Is. 1 : 16-18).
[1] « Maître, quel est, dans la Loi, le plus grand commandement ? » Jésus répondit : « Tu aimera le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, et de tout ton esprit. C’est là le grand, le premier commandement. Et voici le second, qui lui est semblable : Tu aimera ton prochain comme toi-même » (Mt. 22 : 36-39).
[2] « Le jour où vous jeûnez, vous traitez vos affaires, et vous contraignez tous vos ouvriers. Vous passez votre jeûne en disputes et en querelles, vous frappez du poing le pauvre. Ce n’est pas en jeûnant ainsi que vous ferez porter votre voix jusque là-haut. Est-ce là un jeûne qui me plaise, un jour où l’homme se mortifie ? Courber la tête comme un jonc, coucher sur le sac et le cendre : pouvez-vous appeler cela un jeûne, un jour agréable au Seugneur ? Savez-vous quel est le jeûne que j’agrée ? Dit le Seigneur Dieu : c’est de rompre les chaînes injustes, dénouer les cordes du joug, renvoyer libres les opprimés, et brider toute espèce de joug. C’est de partager sa nourriture avec l’affamé, d’héberger les malheureux sans asile, de vêtir les gens déguenillés au lieu de se détourner de son semblable » (Is. 58 : 3-7).
[3] « Le Royaume de Dieu, ce n’est pas le manger, ni le boire, mais c’est la justice, la paix et la joie dans l’Esprit-Saint » (Rom. 14 : 17).